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Doux !
l'heure...
Que dire a une personne d'idéal
qui s'angoisse ? |
Quoi, pas elle !...
Je sors d'une rencontre avec
Réjeanne, une jeune femme splendide, comme il vous est arrivé d'en côtoyer, sans doute :
ce genre de personne enthousiaste, passionnée dans ce qu'elle fait, généreuse
comme quinze et souvent admirée des autres pour son équilibre et son
audace.
Je la rencontrais ce soir apres
quelques semaines d'une peine amoureuse qui l'a jetée par terre. La voila qui
doute d'elle et de son avenir, se reproche de s'etre toujours forcée pour
vivre un niveau d'idéal hors du commun. Plus elle se compare aux autres, plus
elle se déçoit. Pour conclure avec amertume : A
quoi bon avoir fait tant d'efforts pour etre parfaite ?... Et plus elle s'ausculte, plus elle se
juge et s'épuise, arrivant a se voir incapable de nommer un désir ou de
prendre une décision.
Comment me mettre a son écoute,
quoi lui dire qui la remette en selle ?... J'ai pensé vous partager ce qui
est m'est venu, me disant qu'un jour ou l'autre vous pourriez vous aussi vous
sentir pris au dépourvu comme je l'étais.
Le non et le oui d'un tout-petit
Je sentais qu'il me fallait parler
au coeur et de façon simple. J'ai d'abord mimé pour elle, en me couchant au
sol, l'image
qui me venait de sa situation : je la voyais dans un ring de boxe. L'assaillant
était parti; elle, par terre sur le dos, se frappait au visage.
J'ai voulu lui exprimer par la mon sentiment
qu'elle se faisait mal a ressasser dans sa tete tout ce qui l'effrayait, ce
qu'elle se reprochait, ce qui la faisait différente des autres. J'ai voulu la
convaincre qu'avec un niveau d'énergie faible comme le sien actuellement, elle
ne pouvait pas s'apporter quoi que ce soit d'utile a cet exercice d'analyse,
qu'elle méritait mieux que des reproches, et que de toute façon la douleur lui
faisait déformer sa vision d'elle-meme et de la situation.
Nous avons parlé longuement, je
fouillais dans tous mes tiroirs de tendresse. Sa voix toute adoucie montrait son
état d'épuisement et d'émotion. Elle risquait de repartir sans rien
se rappeler si je ne trouvais pas comment simplifier et faire image.
J'ai martelé de plusieurs façons
ce qui me paraissait etre deux
fils conducteurs importants pour elle. Je l'ai amenée, en imagination, a
revoir un petit enfant. On pourrait ramener le langage bien rudimentaire d'un
bambin a deux expressions : oui et non.
Je lui ai dit : Tu es en ce moment ce tout-petit. Je t'invite cette
semaine a te pratiquer a dire oui et non dans de tout petits gestes ou tu as
du pouvoir. Tu n'es pas en danger, rassure-toi, c'est un mauvais moment a
passer. Mais tu vas devoir t'atteler a pratiquer ces deux choses. D'abord, a dire
non a toute analyse a propos de toi-meme : stop ! , tu restes au neutre.
Ensuite, tu t'exerces a dire oui a toutes les occasions de tendresse que tu pourras
t'offrir.
Renouer avec la tendresse de la vie
Oui, Réjeanne, tu vas chercher dans des
mini-gestes de chaque jour a etre bonne pour toi, compenser pour ton entourage
qui n'est pas pret a
etre bon pour toi en ce moment : t'offrir une tablette de chocolat,
dormir une heure de plus, éterniser ta douche,... peu importe.
Vers la fin de notre échange,
c'est Réjeanne qui m'a comme soufflé la conclusion, en me parlant de sa douleur.
J'ai sursauté : j'entendais doux ! l'heure. Il venait de se nommer
la exactement ce dont elle avait besoin. Et, quand on y pense bien,
c'était en meme temps la plus belle réponse a une question que chaque humain
se pose un jour ou l'autre quand ça fait trop mal, bien souvent en maudissant le ciel : pourquoi
diable faut-il passer par la souffrance ?...
Doux ! l'heure :
la douleur est effectivement la
pour nous donner l'heure. C'est l'heure d'etre doux avec nous-meme, l'heure de
nous rappeler que la Vie nous a mis au monde pour etre heureux, mais qu'elle ne peut
rien pour nous si nous n'ouvrons pas notre porte.
Réjeanne s'est couchée fourbue.
A vrai dire, moi aussi ! Elle est repartie avec ce mot Doux ! l'heure ,
griffonné sur un bout de papier dans une pochette. J'étais certain qu'elle
avait le mot de passe qu'il lui fallait pour gérer ses émotions dans les jours
prochains. J'étais rassuré, elle ne risquait pas d'oublier l'essentiel. C'est
comme avec la douleur : elle nous
ramene a l'essentiel.
Et c'est elle qui, sans s'en
douter, venait de me faire un cadeau.
Christophe Élie
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L'ALLUMEUR
DE RÉVERBERES
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