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Le probleme n'est pas le probleme
Pour mieux attraper le cadeau
Le microbe n'est rien,
le terrain est tout
Attribué a Pasteur
Vous arrive-t-il de vous croire en danger devant des événements qui vous font
mal ? Le feuillet 15 nous proposait un sens,
qui pourrait aider a nous rassurer : tout événement ferait partie des moyens
que la vie prend pour nous guider, malgré leur apparence quelquefois
destructrice. Supposons que ce soit vrai. Mais ça reste qu'ils nous font
mal. Comment y faire face au mieux ?... J'aimerais partir de la, et essayer
d'éclairer un peu plus la question. Les familiers du site reconnaîtront des
éléments qui me sont chers, mais peut-etre qu'un paysage d'ensemble en
ressortira avec plus d'évidence.
Le sens que je donne...
La pensée orientale fait la différence entre la douleur et la souffrance : on
ne pourrait pas éviter la douleur, mais on peut la rendre moins souffrante, car
la souffrance serait le sens que nous donnons a cette douleur. Je me dis que la
question devient, en fait : comment arriver, au fil des problemes a régler, a me
forger un état d'esprit tel que la douleur soit moins souffrante, tout de suite.
Et en plus, qu'a la longue je me retrouve moins souvent dans le meme genre de
pétrin ?
J'ai le sentiment ici d'avancer sur la pointe des pieds, tellement arriver a
maîtriser cette zone de notre expérience m'apparaît l'oeuvre de toute une vie...
Pour aujourd'hui, j'ai cette quand meme conviction a vous partager : je crois
que si nos problemes nous blessent et s'incrustent, c'est parce que nous nous
défendons d'eux, tout en restant le nez rivé dessus. Quand nous commençons a
perdre moins de temps a cette adresse-la, que nous déplaçons notre attention a
ce que les problemes veulent nous dire, nous commençons a changer notre terrain,
pour reprendre le mot de Pasteur, et alors nous commençons a pouvoir changer
notre avenir comme disait Walsch. Voyons ça de plus pres, a travers deux cas
concrets :
Un deuil est aussi un clin d'oeil
Le premier cas m'est fourni par le paysage d'un campus universitaire :
avez-vous observé les étudiants étrangers a leur premier hiver au Québec ? Vous
les voyez courir en espadrilles entre la résidence et l'autobus, cachés derriere
leur foulard deux fois enroulé autour du cou. Ils sont a mille milles de
soupçonner qu'on puisse prendre plaisir a une saison pareille, que courir dans
la tempete puisse etre quelque chose d'enivrant.
La deuxieme situation est celle d'une amie, Flora. Elle vivait un fort
probleme de couple : conflit teinté de violence, départ de son fils aîné excédé
par la situation familiale... C'était tantôt la révolte, tantôt l'anxiété, et de
plus en plus la fatigue chronique. Ce qui me frappait chez elle, c'est qu'a
peine lui avait-on parlé d'autre chose, qu'elle trouvait le tour de ramener la
conversation a son conflit. Je ne suis pas sur qu'elle entendait encore les
oiseaux chanter le matin quand elle partait travailler, ou qu'elle apercevait un
écureuil en train de grimper dans un arbre. Toute son attention était sur sa
tension.
Vous voyez ce que ces deux situation ont de commun : un qui se défend du
froid, et n'aperçoit pas ce qu'il pourrait savourer de l'hiver; l'autre qui
tourne en rond dans ses émotions et ne voit plus les petits bonheurs a sa
portée. Les deux encaissent les coups au plus pressé, toute l'énergie passe a se
défendre. Pendant ce temps, le ressenti, l'instinct de plaisir sont au point
mort. On est victime.
Ceci nous ressemble un peu, quelquefois, vous ne trouvez pas ? Combien de fois
faisons-nous face aux problemes en ruminant le sentiment d'etre traités
injustement, d'abord par notre entourage, puis peu a peu par la vie tout court.
Et nous activons a neutraliser les problemes a mesure qu'ils nous tombent
dessus, jusqu'a en sortir épuisés. Pas si différent, quand on y pense, du boxeur
trop accaparé par les coups a esquiver pour etre capable de développer sa propre
stratégie.
C'est la que notre vision des choses entre en jeu et que le fait de revoir une
croyance peut faire toute la différence. La croyance a mettre en place, ici,
c'est celle qu'un probleme est plus qu'un probleme, qu'il est en meme temps un
panneau de signalisation. Et meme davantage : qu'il est une occasion favorable
, pour reprendre l'expression de Joe Vitale, vulgarisateur de la méthode
hawaienne Ho'oponopono. Dans le livre Zéro limite, il explique ce
phénomene de façon saisissante : Les problemes représentent des
mémoires du passé que nous visionnons de nouveau afin de nous offrir une autre
occasion de voir cette situation avec les yeux de l'amour et d'agir
ensuite par inspiration [plutôt qu'avec un réflexe de victime].
**
Qu'il s'agisse d'un déces ou d'un choc émotionnel, d'une maladie ou d'un
échec, j'ai pu vérifier a quel point un deuil n'était plus juste un deuil a
partir du moment ou je me mettais a le regarder comme un clin d'oeil. C'est la
vie qui me serre le bras dans un coin, pour me dire : Hé, réveille ! depuis
combien de temps as-tu cessé d'activer une soif, un désir, de créer un projet
qui te ferait vivre et pas seulement de survivre ?... Et dans d'autres
contextes : Regarde, somnambule ! il y a quelque chose d'important ici que
tu n'as pas décodé encore, cherche donc un peu...
Ce a quoi je résiste persiste
La pratique des arts martiaux fournit un exemple qu'on peut transposer au plan
émotif. Je me rappelle quand je faisais du judo : un coup nous était porté, tout
de suite il s'agissait de désamorcer intérieurement notre réflexe de peur, afin
d'arriver a nous concentrer sur les forces en présence, sur le sens du
mouvement. Puis c'est comme si on avait dit a l'adversaire Tu veux aller
par la ? Allons-y !... . On se servait alors de sa force pour l'entraîner
plus loin, hors de nous, par une bascule des hanches qui rendait le mouvement
sans douleur, et meme gracieux!
Se servir de la force qui nous menace, la canaliser. Hum... beau
programme, vous allez me dire. Est-ce qu'il n'y a pas a ressentir sa
révolte d'abord, et la gueuler ? Que ça soulage ! Est-ce qu'on ne doit pas
éprouver ce qui nous blesse, a l'état brut, sans se précipiter a réagir, tantôt
en fuyant dans sa tete pour l'expliquer, tantôt en voulant se changer tout de
suite, parce que la culpabilité monte ? Que faites-vous de l'envie de pleurer un
bon coup ? Ça fait tellement de bien ! ...
Tout a fait ! Et c'est le premier pas a faire, contacter ce qui fait mal.
Apres, se ramener avec tendresse du fossé au chemin. Je dis juste que le fait de
savoir par avance − et de se rappeler a ce moment-la − qu'on n'est pas en
danger, et que la déroute cache une route, toujours, ça devient un levier
puissant pour se sortir du fossé. Ce que je souhaite partager ici, c'est ma
découverte et celle de tant d'autres, que la douleur perd du terrain non pas
parce qu'on s'est évertué a la mater, mais parce qu'on a choisi de redonner sa
chance a la vie. On a repris le volant et choisi d'en faire l'occasion d'autre
chose. Vous connaissez la phrase évangélique Ne cherchez pas le vivant
parmi les morts ? L'expression du début, le probleme n'est pas le
probleme , me paraît dire exactement la meme chose : le vrai probleme, c'est
chaque fois qu'on perd l'occasion de se remettre dans une attitude créatrice. La
difficulté rencontrée aurait pu etre un tremplin, on s'est simplement barré les
pieds dedans. Dommage. Meilleure chance la prochaine fois...
Rever son futur
Qu'est-ce qui se passe quand on arrive a cette attitude ? Au lieu d'etre en
combat, tout épuisé a se défendre d'une attaque, la meme énergie est déplacée
sur des soifs a combler. On passe de la roche a la terre, je dirais, la ou la
vie peut a nouveau germer... La mort par elle-meme ne fait pas de bourgeons. Ce
qui n'empeche pas que c'est plein de vie dedans , disait Félix Leclerc.
Tiens, a ce propos, je me rappelle un organisme de relevement social, au Pérou,
qui avait opté pour cette attitude d'une maniere radicale : au lieu de discuter
avec les gens de leurs problemes, les animateurs commençaient avec eux par un
rituel : ils faisaient rever les gens sur leur futur. Sans doute pour qu'ils
aillent puiser la l'énergie nécessaire a faire face a leurs défis actuels. Ou
pour qu'ils arrivent a nommer des zones sur lesquelles ils avaient déja le
pouvoir de changer quelque chose.
Revenons a ceux qui m'ont aidé a comprendre tout ça. A propos d'étudiants
étrangers, j'ai vécu une expérience passionnante avec un groupe de jeunes
Asiatiques : une glissade en soucoupes volantes dont ils vont se souvenir
longtemps. Émerveillés de se rouler dans la neige comme le fait un enfant, et
meme d'en avoir chaud !, ils ne voulaient plus quitter le site et songeaient
meme a retarder leur départ en région afin de pouvoir revenir glisser le
lendemain. Je suis sur qu'ils ne pourront plus jamais voir l'hiver avec les
memes yeux.
Et j'ai revu Flora. Elle m'a partagé les décisions auxquelles elle est arrivée
: elle a repris contact avec deux amies, elle qui depuis un bout de temps
s'isolait. Elle s'est abonnée a un programme de cinéma du mardi, pour se faire
une soirée pas comme les autres . Et elle s'est prise une adresse
électronique pour elle seule, se préservant un espace d'intimité dans le
courriel familial. Avec la lueur nouvelle que j'ai aperçue dans ses yeux, je
crois qu'elle a pris le virage.
Christophe Élie
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