Mon trousseau de CLEFS
Pour mieux approcher les défis, les problemes émotifs... ou les décisions
La chronique de l'Oncle Christophe

 


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TENSION  |  REPROCHES   |  CRITIQUES  |  JUGEMENT DES AUTRES
 

  • PARLER DU COEUR A COEUR

La tension monte dans notre relation. Chacun absorbe... rumine... Puis l'orage éclate. Nous nous faisons des reproches, ne savons plus comment nous en sortir sur le moment. Et peut-etre allons-nous rester plusieurs jours sans savoir comment nous rapprocher. Que s'est-il passé ? Pourrions-nous faire autrement la prochaine fois ?...

Quand je regarde un peu mes relations ou la tension a duré apres l'orage  par exemple avec ma conjointe je constate que c'étaient des moments ou nous nous sommes fait des reproches, nous avons parlé de la tete a la tete, et meme de l'armure a l'armure, plutôt que de parler du coeur au coeur.  L'un des deux s'est senti jugé : tu es trop comme ci... pas assez comme ça... ; il s'est senti figé : tiens, tu as encore... , étiqueté en termes de bien ou de mal; ou encore il s'est senti mis en comparaison : moi vs toi, toi vs untel.

Si un couple ou deux personnes proches réalisent cette dynamique, ils peuvent faire un pacte a deux ou la prochaine fois chacun dira le sentiment qui monte, parlera de son émotion plutôt que de formuler un jugement. Car le sentiment vient du coeur, il est sincere comme un enfant qui parle, c'est la douleur a l'état pur. Le jugement passe par la tete, il est travaillé, bourré d'interprétations déja.

Mais pour arriver a dire son sentiment, il faut d'abord s'y connecter : ce pacte a deux appelle donc, l'instant d'avant, un pacte avec soi-meme : se connecter chacun a l'émotion qui est montée, reporter tout jugement pour plus tard. Et ça demande de tenir bon meme si l'autre n'est pas encore rendu la de son côté, d'oser lui donner le temps nécessaire. Peu a peu, l'autre devient plus disposé a m'écouter et arrive a entendre mon émotion, et donc a marcher dans mes souliers ce qui ne s'était pas fait, peut-etre, depuis un bon moment. Moi-meme, je me sens compris, j'ai plus envie de lui donner sa chance. Bien sur, ce pacte autour de l'émotion ne peut se faire que lorsque la poussiere est retombée, quand la longueur d'ondes est redevenue paisible. C'est plus tard que les fruits commenceront a apparaître.

Peu a peu, chacun découvre comment aborder l'autre d'une façon qui apaise le feu émotif plutôt que d'y mettre de l'huile. Du coup, il devient moins défensif face a l'embuche mutuelle, pressent que s'il survient une nouvelle tension, elle n'est pas dangereuse. Et meme qu'elle n'est pas la pour rien : nous avons la capacité d'en faire une occasion de nous aider mutuellement a grandir.

Si on prend l'image de la spirale, nous avons réussi ensemble a monter d'un tour. Le cercle vicieux redevient un cercle précieux. D'un reproche, nous avons fait un re-proches.

  • MARCHER DANS SES SOULIERS UNE LUNE...

La réflexion qui précede m'a servi et meme amené plus loin, par apres. C'était au sortir d'une rencontre de groupe ou l'échange avait été difficile entre moi et un autre participant − appelons-le Gérald. J'étais reparti meurtri, avec le sentiment d'avoir été incompris par lui, et meme traité injustement. C'était d'autant plus important a mes yeux, que Gérald est un ami de longue date et que le sujet de notre mésentente avait une grande importance pour moi. Durant des heures, j'ai eu du mal a me concentrer sur mon travail, habité par la tristesse et le reproche.

Alors j'ai résolu de casser cet état émotif. J'allais pousser le plus loin que je le pouvais l'effort de voir les choses a la façon de Gérald. Seul dans le silence, je me suis d'abord mis dans la meilleure condition possible, physiquement et intérieurement. J'ai alors imaginé que je m'adressais au groupe et j'ai entrepris de présenter aux gens ce qu'était l'état d'âme de Gérald :  Moi, Gérald, je... J'ai pu ainsi faire le tour de tout ce que Gérald avait cherché a apporter de bon a la rencontre et des raisons qui l'appuyaient, celles qui étaient légitimes a ses yeux. Tres vite, je me suis senti réconforté, et la crainte que dans la suite tout ça tourne au vinaigre s'est aussi désamorçée en moi.

Dans ce petit exercice intérieur, j'appliquais sans me le dire le principe amérindien millénaire, qui enseigne qu'on ne peut comprendre quelqu'un qu'apres avoir marché une lune dans ses souliers. C'est aussi le principe actif de la médiation de couple, qui a fait ses preuves depuis longtemps : devant une personne bienveillante et neutre, chacun des partenaires est invité a dire jusqu'au bout ce qui monte en lui, puis a écouter jusqu'au bout ce que l'autre va exprimer a son tour.

Mais je réalisais intuitivement qu'on pouvait rendre l'exercice plus bénéfique encore. En disant  Moi, Gérald, je... , l'exercice était pour le moment mené seul avec moi-meme. J'étais déterminé a marcher dans ses souliers, a lâcher prise sur ma propre frustration. Si l'exercice était fait en groupe, Gérald pourrait constater mon engagement a le comprendre plutôt qu'a le juger. Ensuite, il serait a meme de voir si je l'ai bien compris. S'il sentait le besoin de reformuler certains aspects pour pour etre mieux compris encore, il en arriverait du meme coup a mieux se comprendre lui-meme. Car lorsqu'on se débat avec le sentiment d'etre incompris, nos émotions deviennent comme une toile d'araignée ou on s'emmele soi-meme. J'étais convaincu que le meme exercice pourrait aussi bien etre fait dans mon couple, lorsqu'il nous faut dénouer une impasse émotive, et sans qu'il soit besoin d'un médiateur externe. 

Pour revenir a mon ami Gérald, je lui ai écrit un mot peu de temps apres avoir fait mon petit exercice. Je n'ai pas eu de ses nouvelles encore, mais je mettrais ma main au feu que mon geste va l'avoir touché, et que du coup nous allons etre tous les deux sur un bien meilleur pied pour faire progresser la prochaine séance de travail. 

  • INDÉPENDANCE ÉMOTIVE

Pourquoi sommes-nous capable de voir les pire tensions s'exprimer a la télévision ou dans un film sans etre tout remué intérieurement ? Parce que nous sommes détaché de ce qui arrive a l'autre : c'est sa vie, ce sont ses émotions.

Dans mon quotidien familial, au travail, quelle différence ! Un proche entre en colere : ça me concerne forcément... ai-je le réflexe de me dire. Vite je cherche a a me justifier, essayant de raccorder les choses. L'autre grimpe de plus belle dans les rideaux... Et je constate que sa colere monte encore... jusqu'a ce qu'il ait entendu de ma part quelque chose qui lui dise enfin je t'ai compris . Ah, c'était simplement ça... J'ai raté l'occasion, je l'ai pris personnel .

Notre défi est ici de refuser momentanément de nous impliquer par émotion. Dans notre tete, déja, réagir par un Qu'est-ce qui lui arrive ? plutôt que par un Qu'est-ce que j'ai fait de pas correct ?   C'est donc de faire la différence entre ce que l'autre éprouve et ce qui pourrait me concerner, en lui laissant la charge de son émotion plutôt que de me précipiter pour la prendre sur moi.

Pour vous aider, essayez cette petite clé : pendant un moment, vous faites comme si  l'autre vous faisait une confidence qui n'a rien a voir avec sa relation avec vous. Votre réaction a ce moment n'est pas si différente de celle qu'aurait un consultant, un psychologue qui écoute avec détachement. Ou encore, si la réaction de l'autre vous paraît immature, imaginez que vous avez affaire a un enfant capricieux. Vous aurez peut-etre spontanément la réaction de lui répondre : dis donc, veux-tu bien arreter ton cirque ?...

Que se produit-il alors ? De votre côté, vous venez de respecter votre intégrité personnelle. Vous avez regardé l'autre pour lui-meme, dans son jardin a lui. Du fait que vous avez manifesté une indépendance émotive dans la situation, l'autre se sentira moins justifié de vous blâmer. Non seulement parce que vous n'avez pas ouvert la porte a prendre sur vous son émotion (l'autre a été obligé de garder ses poubelles dans sa cour). Mais c'est justement parce que vous ne l'avez pas fait que sa charge émotive va se dégonfler : une personne qui entre en instabilité émotive, en colere ou autrement, a besoin de trouver devant elle un répondant stable, solide sur ses pieds : ça la sécurise face a sa propre émotion. Sinon, simplement par insécurité, elle sera portée a s'enflammer davantage.

Par la suite, bien entendu, vous aurez a regarder si  l'émotion de l'autre vous concerne vraiment. Mais ce sera un si de personne libre, pas un si d'esclave émotif qui ne vit que pour faire plaisir aux autres, en quete de leur affection.

Bien sur, c'est plus facile a dire qu'a faire. Mais ça vient, avec un peu de pratique   a commencer par la pratique de la vérité avec votre propre émotion.

Jetez peut-etre un oeil au theme BLESSURE D'ENFANCE, souvent associé a cette réalité.

  • UNE COCHE DE PLUS

Je crois comprendre que lorsque nous sommes déçu de quelqu'un, choqué par son comportement ou son attitude face a nous, le secret est de répondre par quelque chose d'un peu plus amoureux que ce qui nous est offert.

Quand j'y réfléchis, je me rends compte que c'était déja une suggestion de l'Evangile, que je cite de mémoire : Si quelqu'un te frappe sur une joue, tends-lui l'autre. S'il t'oblige a faire une lieue, fais-en deux.   L'approche Oeil pour oeil, dent pour dent n'est pas a mettre de côté parce qu'elle est moins morale, mais parce qu'elle est moins efficace.

Le principe actif derriere tout ça ? Je pense que c'est le message que ce qui fait vivre sera toujours plus fort que ce qui fait mourir. Pour sortir de l'impasse, opposer a l'agression une réaction qui soit une coche de plus vraie
, une coche de plus amoureuse ...

Pour y parvenir, je constate qu'il faut certaines conditions. La premiere, c'est d'etre tres au clair avec notre motivation : sentons-nous le besoin d'acheter l'affection de l'autre ? Ou encore de prendre du pouvoir sur lui, de sauver la face ? Souhaitons-nous obliger l'autre a changer sans que nous ayons, nous, a le faire aussi ? Ou souhaitons-nous vraiment voir l'autre grandir ? Une autre condition, c'est la patience de voir arriver les changements chez l'autre en leur temps, ce qui veut dire en son temps a lui ou a elle. Et puis, cette attitude ne sera jamais facile : seule la pratique et un contexte chaleureux la fera avancer... d'une coche de plus.

  • PAS MOI, MAIS MA STRATÉGIE...

Je suis souvent frappé de voir a quel point un reproche reçu peut nous débalancer quand nous le prenons personnel . Un collegue de travail me fait une remarque désobligeante, et j'ai vite fait de m'en servir pour me traiter moi-meme de pauvre type. Sur le coup, je deviens une marmotte : je rentre dans mon trou, je m'ausculte, et je me paralyse au point d'en devenir distrait devant le prochain geste a poser... Si je ne réagit pas promptement a ce sentiment par l'humour ou en l'envoyant promener ― au moins dans ma tete ―, ce malaise peut facilement s'amplifier :  décidément, je n'ai rien appris, je tombe toujours dans les memes travers...  Ça peut meme m'amener jusqu'a poser des gestes qui portent plus a conséquence, comme vouloir changer d'emploi.

Ça m'a fait que du bien de lire un passage de Deepak Chopra, dans Osons la paix **, ou il rappelle une vérité capitale : jamais personne ne pourra affecter qui nous sommes en profondeur, notre identité premiere est magnifique et inattaquable, quoi qu'il arrive.

Comment récupérer ça pour le tourner a notre avantage dans un moment de confrontation avec quelqu'un, ou dans un instant de reproches personnels, comme chacun de nous est si habile a s'offrir ?

J'en arrive a me dire qu'il faut faire ceci : apres avoir pris une bonne respiration pour ressentir l'émotion qui s'est déclenchée, choisir de prendre ce qui nous est dit a un niveau seulement fonctionnel : Ce qui est remis en question, ce n'est pas moi, mais ma stratégie. Je ne deviens pas tout d'un coup un pauvre type parce que j'ai pris le fossé.  Peut-etre qu'effectivement si je m'y prenais autrement, j'obtiendrais davantage les résultats recherchés... Je le retiens pour une prochaine fois...

Quand on y pense, nos gaucheries sont-elles si différentes des essais que fait un chercheur dans son laboratoire ? Il tente une hypothese et explore pour savoir ce que ça va donner. S'il fallait qu'il s'en veuille a chaque fois que son hypothese de recherche n'est pas concluante, il n'y aurait plus grand monde pour oser faire ce métier !

La recherche pour apprendre comment vivre une vie est surement le plus beau métier du monde. Surtout si nous nous exerçons a prendre une critique comme un cadeau déguisé, puisqu'a chaque fois nous en apprenons un peu plus sur nous-meme et sur comment fonctionne la vie.

Nous rappeler que notre moi profond est splendide et indéracinable, et donc aucunement en danger, peut nous redonner un peu plus vite de quoi retomber sur nos pieds apres un reproche : un peu d'humour notamment, oser rire de nous-meme. Et la décision de nous servir de l'événement pour enrichir notre trousse de chercheur...
 

  • LOIN DE SOI

Il m'est venu une autre réflexion a propos des jugements des autres. Si plusieurs personnes nous renvoient le meme genre de reproche, ou si notre milieu se fait de nous une image négative, se pourrait-il que ce soit un signal pour nous dire tu n'es pas toi-meme... et ça m'agace .

Regardez une personne bien dans sa peau, qui se permet d'etre comme elle est : avez-vous remarqué qu'elle en devient attachante, meme si pourtant elle est tres différente de nous ?

Le jugement des autres nous blesse, nous fait nous sentir tout croche. Il arrive que nous nous dépechions a croire que le message est de  rentrer dans le rang , de devenir comme tout le monde. Alors c'est le combat intérieur : sentiment de culpabilité, rébellion, recherche gauche de nous faire accepter... : un beau marécage ou nous nous paralysons pour un certain temps et en sortons épuisé.

Mon idée derriere ça, c'est de nous pratiquer a casser ce réflexe, a changer notre interprétation :  les autres ne veulent pas m'obliger a etre comme eux, ils souhaitent que je sois davantage comme je suis vraiment... Voyez un peu si le fait de vous rapprocher de vous-meme pourrait arranger peu a peu les choses : vous écouter pour entendre votre réaction naturelle dans une situation, vous reconnecter plus souvent a vos désirs, a votre coeur d'enfant... En somme, retrouver cette aisance ou vous redevenez un peu plus dansant, car c'est ce qui attire les autres et fait de votre différence un plus dans leur décor.

Les gens aiment a nous voir 'nature', a nous voir vivre par plaisir plutôt que par crispation. Meme douloureuse, leur réaction cache ce cadeau.


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Édité par le site GRANDIR, QUÉBEC
http://www.sitegrandir.com

N'hésitez pas a reproduire nos textes, en indiquant la source.
 v2007-09-09

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